L'inversion des rôles au théâtre est un art qui met la perception du spectateur à rude épreuve. C'est la signature de l'existence d'une autre réalité qui nous invite à la rejoindre par le seul chemin de la perception. C'est aussi le principe de "The Cage" où une cage vous sépare des Talosiens. Si vous vous percevez à l'intérieur de la cage, vous pensez que les Talosiens sont à l’extérieur et leur donner ainsi le pouvoir de maître. Pour percevoir une autre réalité, vous devez du même endroit, vous percevoir en dehors de la cage et si vous y arrivez, vous pouvez à présent penser que les Talosiens sont à l'intérieur de la cage ou à l'extérieur avec vous dans une nouvelle cage qui se dessine.

Aujourd'hui, on ne compte plus le nombre de couleuvres que les Q ont fait avaler aux hommes. Ici, mêmes les spectateurs (profanes) sont insidieusement embarqués dans la pièce de théâtre par un procédé de départ manichéen vieux comme le monde, et qui pourtant, nous blouse trop souvent encore. L'équipage c'est les bons et Trélane se retrouve très rapidement en position de méchant, ce qui à l'époque, devait déjà brouiller les cartes, aujourd'hui encore c'est certain.

Trélane propose avec deux entités complices, une expérience qui met en évidence un certain nombre de failles psychologiques chez l'espèce humaine y compris celles du téléspectateur en tant que tel. Malgré tout ses vicieux efforts de politesse, de courtoisie, ainsi que ses majestueuses qualités d'hôtes, Trélane est maître de la dérision, de l'ironie, du sarcasme, une véritable symphonie orchestrale assez mal perçue des hommes.

Il commence par piéger tous les sens de ses invités pour les faire tourner en bourrique et pour amorcer des chaines de réactions qu'il devine comme dans du marc de café. La créature de Nancy Crater, le feu sans chaleur  pour jouer du tricorder, du cognac sans goût pour un épicurien,  une inversion artistique qui met out l'esprit logique de Spock en 2 secondes, un capitaine déconnecté des compétences de ses coéquipiers, qui ne lui seraient pourtant d'aucune utilité dans cette mise en scène, et faisant croire qu'il est jaloux mais remarquable dans ce rôle, pour seulement quelques pas de danses avec celle qu'il ne pourrait lui-même toucher de la sorte.

Kirk est alors un homme trop dupe, trop aveugle, dépassé pour ce rendre compte qu'il a déjà hypothéqué sa chance de comprendre ce qui l'a humainement dérouté de cette autre réalité. Tout a réellement basculé lorsqu'il se prétend "emprisonné". Emprisonné pour quoi me direz-vous ? Uniquement pour faire tellement confiance à ses appareils de communication, qu'on dirait des gamins sortant du lycée avec leurs smartphones à la main.

A travers un parcours progressif, Trélane conduit doucement Kirk la corde au cou vers sa déchéance verbale. Accusé à la barre, il reprochera à Trélane tout ce qu'il pourrait se reprocher à lui-même et au nom de l'humanité toute entière. Ce sera également le dilemme de Picard avec Q dans un même déni de justice de la fédération. Toutefois, si le présent de Kirk ne lui permet pas d'être responsable de son passé, il ne lui permet pas non plus de s'en dédouaner avec les 900 années qu'il brandit comme une carte à jouer.  

Pour sa défense, Kirk se sera conduit comme ses ancêtres dont le passé l'accuse. Celui-là même qui reprochera à Trélane de manquer d'originalité, de réflexion, qui le traitera d'incapable, pompeux, inconscient et fou.

Kirk voulait voir une machine en Trélane et il vit une machine. Il voulait que Trélane s'énerve et il vit Trélane s'énerver. Il voulait voir un enfant en Trélane et il vit un enfant, il voulait gagner à tout prix et il avala une couleuvre plus grosse que lui. L'histoire du papa et de la maman qui n'ont pas surveiller leur enfant.

Le chevalier de Dalos est une pièce remarquable, un best Play of TOS.